Article du com. Matthieu Bolle-Reddat, Conducteur de trains à Paris, Membre du secrétariat du Syndicat CGT des cheminots de Versailles

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La lutte du printemps des agents roulants de la SNCF

La grève des agents roulants de la SNCF (Société Nationale des Chemins de fer Français – 100% public) a fait couler beaucoup d’encre et a monopolisé les médias français au cours du mois d’avril.

Les cheminots roulants (conducteurs et chefs de bords), tant au trafic régional que national, tant au fret qu’au service des voyageurs, revendiquent depuis des années avec leurs Syndicats de lutte et en premier lieu la CGT, la revalorisation de leurs primes métier spécifiques, qui représentent jusqu’à 40% de leurs salaires.

Ces primes, qui sanctionnent la technicité et les spécificités des métiers roulants et qui comptent pour le calcul de la pension de retraite, sont en effet bloquées depuis des années.

Dans un contexte d’inflation colossale et alors que la SNCF a fait 1,6 Milliards de bénéfices en 2024 et qu’elle prévoit de nouveaux bénéfices importants en 2025, les cheminots roulants exigent tout naturellement des augmentations importantes et pérennes de leurs salaires.

Mais ce combat intervient aussi dans un contexte d’ouverture à la concurrence, ou plutôt de privatisations échelonnées, ligne par ligne, du réseau ferré national.

Depuis les catastrophes ferroviaires dues à la privatisation du rail britannique, jusqu’au drame de Tempé en Grèce en 2023, qui a donné lieu des grèves et manifestations immenses en Grèce en 2025 notamment à l’initiative du Syndicat PAME mais aussi associations étudiantes: nous avions conscience que la privatisation est un danger pour le service public ferroviaire et pour les usagers du rail.

Mais nous commençons seulement à en voir les conséquences pour les conditions de travail et de rémunération des cheminots !

Car ce processus de privatisation se fait au rythme d’appels d’offre par les régions pour des lots régionaux, et sert de prétexte à l’entreprise pour justifier le blocage des salaires des cheminots et surtout la dégradation constante de leurs conditions de travail et de leurs conditions de commande.

Il faut désormais accepter d’être « flexible », accepter que tes horaires et tes heures de repos changent constamment sans préavis, pour assurer la production ferroviaire au détriment de la stabilité des conditions de travail et au détriment de la vie personnelle et familiale des cheminots.

Le discours des gouvernements et du patronat ferroviaire en France est désormais bien rodé : si vous refusez le blocage des salaires et la flexibilisation des horaires, alors on va vous privatiser votre ligne !

Les Syndicats de lutte de classe, en premier lieu les Syndicats CGT cheminots dans les dépôts, ateliers et gares, avait bien raison lors du combat contre la réforme ferroviaire de Hollande en 2016 et de Macron en 2018 (transcription en France du 4ème paquet ferroviaire de l’Union Européenne) : le processus de privatisation n’est pas fait pour « améliorer le service ferroviaire », il est le prétexte et le moyen d’attaquer les droits et les salaires des cheminots pour permettre à des actionnaires privés de faire plus de profits !

Voilà pourquoi, après l’échec de négociations où la direction a rejeté nos revendications pendant plusieurs mois, la CGT a appelé l’ensemble des cheminots roulants à la grève les 5, 6 et 7 Mai pour exiger l’ouverture de véritables négociations.

Le ministre des transports du gouvernement Macron, issu du parti de droite « Les Républicains » et sous le coup d’une inculpation pour « détournements de fonds », a déclaré quelques jours avant la grève que « les cheminots ne sont pas à plaindre et que leurs revendications n’étaient pas légitimes » et a menacé de déposer une proposition de loi pour interdire les grèves de cheminots en période de vacances scolaires ou de grands week-ends du mois de Mai.

Mais les cheminots roulants ne se sont pas laissés impressionner et c’est plus de 1 sur 2 qui étaient en grève, pendant ces 3 jours au niveau national, avec plus de 65% et jusqu’à 80% de grévistes dans de nombreux dépôts du trafic régional, soit les lignes les plus menacés par le calendrier de privatisation !

Pour faire circuler ses trains coûte que coûte, la direction n’a pas hésité à faire remplacer les chefs de bord grévistes par des « jaunes », des cadres y compris qui ne sont pas du tout de la filière (comme des cadres du service RH ou du service comptabilité), pour remplacer les grévistes avec une prime de 50 Euros de plus PAR HEURE.

Quand une entreprise est capable de payer 50 Euros par heure un agent pour remplacer un gréviste que revendiquer 100 Euros de plus par mois, c’est bien que cette entreprise aurait les moyens de satisfaire les revendications des grévistes !

Mais malgré ça, face à la puissance gréviste, la direction a enfin accepté d’ouvrir des négociations le 4 Juin pour les conducteurs et le 11 Juin pour les chefs de bord.N’ayant aucune confiance dans la négociation « à froid », la CGT a appelé les cheminots roulants à la grève le jour de ces « négociations » pour les mettre sous la pression de la grève et des grévistes : ce combat ne fait donc que commencer !

Ce mouvement puissant en France, survenant quelques mois après les grèves des cheminots britanniques, quelques semaines après les grandes grèves des cheminots de Grèce, quelques jours après les grèves des cheminots de Belgique, et une semaine avant la grève historiquement suivie des cheminots de la CP du Portugal, s’inscrit dans une chaine de lutte des travailleurs du rail à l’échelle européenne.

Il apparait évident que nos combats sont les mêmes, contre la privatisation et ses conséquences, pour de meilleurs salaires, de meilleures retraites, de meilleures conventions collectives, pour un chemin de fer qui soit au service des intérêts populaires et non pour les profits!

Il apparait évident qu’il faut que nous partagions ces expériences, nos analyses, que nous nous soutenions les uns les autres, mais aussi que nous travaillions à la convergence de nos luttes dans le futur, à être capable de bloquer nos pays respectifs par la grève tous ensemble et en même temps afin d’imposer nos revendications au patronat ferroviaire et aux gouvernements de nos pays respectif, mais aussi à l’Union Européenne qui impose ses directives antipopulairessur le ferroviaire !

Matthieu Bolle-Reddat,

Conducteur de trains à Paris

Membre du secrétariat du Syndicat CGT des cheminots de Versailles

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